エピソード

  • Environnement: des accords de Paris à Bélem … Et après ?
    2025/12/11
    Toute cette semaine, à l'occasion du dixième anniversaire de l'Accord de Paris sur le climat, conclu le 12 décembre 2015, notre Question d’environnement est consacrée aux grandes étapes qui ont conduit à cet accord historique. Hier, nous évoquions les enjeux précédant la signature de l’accord de Paris en 2015. Aujourd’hui, retour sur la période allant de Paris à la COP30 de Bélem. Et cette question : et après? Le 12 décembre 2015, 195 pays signent l’accord de Paris, un traité international qui oblige juridiquement ses signataires à agir contre le changement climatique. Objectifs : ne pas dépasser les 1,5° degré d'ici la fin du siècle. Atteindre le zéro émission nette et aider financièrement les pays vulnérables à s’adapter au nom de la solidarité. Dix ans après, quel est le bilan ? « L'action climatique a été modifiée par l'accord de Paris, nous explique Michel Colombier, directeur scientifique de l'Institut du développement durable et des relations internationales. On a aujourd'hui des institutions, des plans, des mesures dans la plupart des pays qu'on a regardés. Et il y a un changement de trajectoire d'émission. Après, on sait que, pour l'instant, les pays ne sont pas sur la fameuse trajectoire de neutralité carbone à partir de la 2ᵉ moitié du siècle. Nous n'y sommes pas, donc il y a du mieux, mais il y a encore beaucoup d'ambition à gagner. » Financer l’adaptation des pays du Sud au changement climatique. C’est l’article 9 de l’accord de l’Accord de Paris. Plus que de solidarité, il s’agit de morale, car les pays du Sud sont ceux qui subissent le plus durement les conséquences du changement climatique alors qu’ils n’en sont peu ou pas responsables. Une enveloppe de 40 milliards de dollars par an leur est alors octroyée, mais jusqu’à présent ils n’en ont touché que 26 alors que les besoins augmentent. Pour les pays du Sud, la COP30 de Bélem était donc l’occasion de réclamer un triplement du fonds pour l’adaptation. Mais ils n'ont obtenu qu'une vaste promesse de triplement de ce fonds d’ici 2035, au lieu de 2030, et surtout sans aucune obligation pour les pays du Nord car ces États ne veulent pas payer seuls l’addition depuis le retrait des États-Unis de Donald Trump de l’accord de Paris. Pour les observateurs, Bélem marque donc un recul sur la question de l’adaptation. La sortie progressive des énergies fossiles. Elle a été actée lors de la COP de Dubaï en 2023 mais sans aucune feuille de route précise. Cette question a donc fait l’objet d’âpres négociations à Bélem. Pour contrer les États pétro-gaziers et la Russie, qui ne veulent pas entendre parler de sortie des fossiles, 90 pays - dits ambitieux - ont formé une coalition pour obtenir cette fameuse feuille de route sur la sortie du charbon, du pétrole et du gaz. Mais sans succès. Alors peut-on parler d’échec de Bélem à ce niveau ? « Les COPs sont là pour mettre une pression politique sur les pays, reprend Michel Colombier:. Ce qui est intéressant à Bélem, c'est le fait qu'un groupe de pays se soit dit : les énergies fossiles, nous, nous sommes persuadés que la seule solution c'est d'en sortir. Et ce groupe de pays s'est dit : on va se rencontrer au début de l'année prochaine pour une action de coalition. Et c'est dans ce cadre, à l'extérieur des Nations unies, qu'on peut avancer sur les sujets concrets de mise en œuvre réelle des politiques, de transition énergétique, de sortie des fossiles etc. » À lire aussiClimat: «Nous avons besoin d'action politique pour atteindre l'objectif de 1,5°C» Les COPs sont les seules enceintes pour maintenir le climat en haut de l’agenda, un endroit où tous les pays peuvent faire entendre leur voix. Mais le revers de la médaille, c’est que chacun défend ses priorités nationales et son modèle de développement. Bélem en est la parfaite illustration. Mais d’autres modes de négociations voient désormais le jour, pour le climat pour le futur et le bien être de l’humanité.
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  • Du protocole de Kyoto à l'accord de Paris
    2025/12/10
    Toute cette semaine, à l'occasion du dixième anniversaire de l'accord de Paris sur le climat, conclu le 12 décembre 2015, notre Question d’environnement est consacrée aux grandes étapes qui ont conduit à cet accord historique. Aujourd’hui gros plan sur les enjeux pour aboutir à l’accord de Paris en 2015. En décembre 1997, la COP3 adopte le protocole de Kyoto, premier texte qui introduit des engagements contraignants pour les pays développés et les pays de l’ex-bloc soviétique, qui doivent réduire de 5 % leurs émissions de GES d’ici à 2012. Mais, pour entrer en vigueur, le Protocole de Kyoto doit être ratifié par un nombre suffisant de pays représentant un certain volume d’émissions. Or, en mars 2001, Georges W. Bush est élu président des USA, et il annonce que les États-Unis ne ratifieront pas le protocole de Kyoto. Une question se pose alors : que signifie un tel protocole sans les États-Unis, à l'époque premier émetteur de GES ? Cette sortie entraîne une forte décrédibilisation du processus auprès des pays en développement. Finalement, le protocole de Kyoto entre en application début 2005. Il a le mérite de mettre le changement climatique à l'agenda politique, mais de nombreux problèmes restent à régler. Michel Colombier est le directeur scientifique de l'Institut du développement durable et des relations internationales: « Il y avait un problème particulier qui était l'absence dans ce groupe de pays de pays émergents, notamment la Chine, qui était à la fois une condition pour un certain nombre de pays industrialisés de reprendre des engagements et une condition aussi pour faire revenir les USA à la table des négociations, qu'ils avaient quittée précédemment. Donc, il y avait vraiment un double enjeu. Un enjeu de retrouver les négociations avec l'ensemble des participants et un enjeu d'avoir un accord climat après 2012 parce que sinon Kyoto ne fonctionnait pas. » De 2005 à 2009, l’Union européenne préconise d’élargir le protocole de Kyoto aux pays émergents. Les États visent la COP de Copenhague, en 2009, pour trouver une suite à Kyoto. Les enjeux sont énormes. Formuler un objectif à long terme. Décider de la forme juridique de l'accord, afin qu’il soit accepté par le Congrès américain. Mais, entre temps, la donne a changé et certains pays qu’on appelait émergents à l’époque se sont développés. La Chine, avec sa croissance à deux chiffres, est devenue le premier émetteur mondial de GES. Les pays du Nord aimeraient donc les mettre à contribution, mais les pays du Sud rappellent leur droit au développement et la responsabilité historique des pays du Nord. Tous ces éléments contraires vont provoquer le naufrage de la COP à venir, celle de Copenhague. Michel Colombier, directeur scientifique de l'Institut du développement durable et des relations internationales : elle se termine par un échec parce qu'on n'arrive pas à trouver un accord permettant à la fois aux pays émergents de rentrer dans l'action climatique, et en même temps de trouver une méthode pour organiser cette action. À Copenhague, un certain nombre de pays trouvent un accord. Mais ils le trouvent en dehors des Nations unies. Ils le trouvent en petit groupe de pays et l'Europe est rattachée au dernier moment à cet accord. Et quand cet accord est présenté à l'ensemble des pays, ces pays disent : « Non, nous n'acceptons pas un accord négocié en catimini par quelques-uns. » L'échec de la COP de Copenhague en 2009 La COP de Copenhague se solde donc par un fiasco. Plusieurs chefs d'État et de gouvernement quittent Copenhague bien avant la fin, le Russe Medvedev, le Brésilien Lula. De leur côté, les États-Unis et la Chine discutent en aparté pour déceler un accord qui leur permette de préserver leur souveraineté, et qui ne soit pas contraignant. On parlait alors de négociation du G2. Lorsque le président Obama annonce à la télévision qu'il a obtenu un accord, la plupart des autres délégations ne l'avaient même pas lu. C'est un terrible affront pour les délégués, et pour l'Europe, qui était normalement fer de lance des négociations. Fou de rage, le président vénézuélien Hugo Chávez tacle les pays industrialisés : « Si le climat était une banque, dit-il, vous l'auriez déjà sauvé ! » La COP de Copenhague lance les négociations vers l'accord de Paris en 2015. La Cop 21 à Paris est défendue par Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, et Laurence Tubiana qui coordonne les négociations. Leur tâche est ardue. Il faut redonner confiance aux pays qui se sentent trahis et faire revenir tout le monde à la table des négociations. Une mission difficile. Pourtant juste avant la conférence, l’espoir est bien là. Michel Colombier, directeur scientifique de l'Institut du développement durable et des relations internationales : « Quand on arrive à Paris, je dois dire qu'on était...
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  • Quel rôle le premier rapport du Giec a-t-il joué dans l'action climatique?
    2025/12/08
    Toute la semaine, à l'occasion du dixième anniversaire de l'Accord de Paris, conclu le 12 décembre 2015, la question d’environnement sera consacrée à de grandes étapes qui ont conduit à cet accord historique. Le premier épisode nous renvoie 35 ans en arrière avec le premier rapport du Giec. Le Giec, le groupe d’experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, est créé en 1988 par l'Organisation météorologique mondiale et le Programme des Nations unies pour l'environnement. Mais ce sont des travaux des années 1970 qui ont indirectement enclenché le processus. Et « le rapport Charnay marque le début d'une mobilisation de la communauté scientifique dans les années 1980 », explique Jean Jouzel, vice-président du groupe 1 du Giec de 2002 à 2015. Ce rapport a établi un ratio d'augmentation des températures en fonction de la concentration de de CO2 dans l’atmosphère.  Un rapport qui ne finit « pas dans un tiroir » Et finalement, le G7, en particulier la Première ministre britannique Margaret Thatcher et le président américain Ronald Reagan, suggèrent la création du Giec.  « Les décideurs politiques sentaient bien qu'il y avait un problème », souligne Jean Jouzel. « Et la réponse des décideurs politiques dans ces cas, c’est de mettre en place des groupes de travail. Très souvent, ces groupes de travail produisent des rapports qui vont dans des tiroirs. Et là, le mécanisme qui fait que ces rapports ont une importance, c'est le mécanisme d'adoption des rapports du Giec », poursuit le paléoclimatologue. « Inventer la façon de travailler »  Car le travail du Giec est très novateur. Parmi ses particularités, la validation du résumé pour les décideurs par tous les pays membres. Une validation politique donc, mais sans compromis assure Youba Sokona, expert malien des énergies et plus de trente ans de Giec au compteur : « Les scientifiques restent les gardiens de l'intégrité scientifique. Aucune phrase ne peut être modifiée si elle devient scientifiquement fausse ». À lire aussiL'histoire des COP climat de Rio à Charm el-Cheikh Youba Sokona arrive à la fin des travaux du premier rapport. Les scientifiques et les enjeux africains étaient alors peu représentés et les questions de développement n’étaient pas vraiment abordées. Alors des collègues font appel à lui. Au-delà du processus de validation qui lui a causé « des nuits sans sommeil » par la suite, Youba Sokona décrit un esprit pionnier : « rien n'existait encore qui ressemble à la méthodologie actuelle du Giec. Il a donc fallu inventer la façon de travailler presque en marchant. Les scientifiques venaient d'horizons très différents avec leurs propres méthodes, avec leur propre culture disciplinaire, et il fallait également construire une approche commune. Moi, quand je me suis retrouvé là-dedans, je me disais : "qu'est-ce que je fais ici ?". Et très vite, une logique s'est imposée, il fallait compiler l'état des connaissances existantes, les évaluer de manière critique et surtout séparer strictement la science de la politique ». Le rapport écrit rapidement, en deux ans contre cinq à sept ans actuellement, mais les grandes lignes sont déjà là. Il prévoit un réchauffement de la température mondiale d'environ 2°C en 2025 par rapport à l'époque préindustrielle et de 4°C d'ici 2100 par rapport à l'ère préindustrielle. Il prévoit aussi une hausse importante du niveau de la mer. Quant au lien entre réchauffement climatique et activité humaine. Le rapport pause la question plus qu'il n'y répond. Le Giec écrit que l'humanité est capable en augmentant la quantité de gaz à effet de serre dans l'atmosphère de faire grimper le thermomètre. Mais dans ce premier rapport, la part de l'homme dans le réchauffement climatique reste encore incertaine. La certitude du lien de causalité « est venue progressivement. À la question : "est-ce qu'il y a vraiment un réchauffement climatique lié aux activités humaines ?" la réponse est peut-être dans le deuxième, très probablement dans le troisième et le quatrième. Plus de 95% de confiance dans le cinquième. Et c'est une certitude désormais, tel que le dit le sixième rapport du Giec », raconte Jean Jouzel. « Rapport déterminant »  Ce premier rapport joue un rôle essentiel pour la suite. «  Il y est pour beaucoup dans la mise sur pied de la convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques », estime le paléoclimatologue. Youba Sokona confirme : « Chaque rapport du Giec a été déterminant pour une action politique forte. Sans le rapport du GIEC, il n'y aurait pas l'Accord de Paris ». La création de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques, ce sera à Rio deux ans plus tard. Mais un peu de ...
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  • Inondations au Sri Lanka: quels droits pour les «réfugiés climatiques»?
    2025/12/04

    Alors que 1400 centres d’hébergement d’urgence ont été ouverts au Sri Lanka pour accueillir les populations déplacées par les inondations dévastatrices, la question des réfugiés climatiques revient sur le devant de la scène. Une expression largement utilisée, mais trompeuse, car sans existence juridique.

    Le terme « réfugié climatique » n’a aucune reconnaissance légale. La Convention de Genève de 1951 encadre strictement le statut des réfugiés politiques, mais ne couvre en effet pas les déplacements liés à des facteurs environnementaux ou climatiques.

    Cela ne veut pas dire que ces situations ne nécessitent pas de protection, souligne Benoit Mayer, professeur de droit du changement climatique à l’université de Reading, au Royaume-Uni. Mais il précise : « il est très difficile de déterminer si une personne est déplacée à cause d’un changement environnemental et a fortiori à cause du changement climatique ». La dégradation graduelle des conditions de vie jouent souvent un rôle indirect, mêlée à des facteurs socio-économiques.

    Dans des cas exceptionnels, comme les inondations au Sri Lanka, le lien avec le désastre est plus clair. Mais, « le concept de réfugié ne serait pas forcément pertinent, puisqu’en droit international, il indique un déplacement forcé au travers des frontières internationales ». Les personnes concernées relèvent ici d’un autre régime : celui des déplacés internes.

    À écouter aussiRéfugiés climatiques : le droit international est-il prêt pour leur accueil ?

    Des millions de déplacés internes, mais peu de migrations internationales

    En 2024, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) estimait que plus de 46 millions de personnes dans le monde ont été déplacées par des catastrophes climatiques. Un chiffre à manier cependant avec prudence : mesurer précisément la part du climat dans un exil reste extrêmement complexe.

    Les déplacements internationaux, eux, restent marginaux. Ils pourraient augmenter dans les décennies à venir pour certains États insulaires du Pacifique — Tuvalu ou Kiribati — menacés par la montée des eaux. Mais l’horizon est encore lointain, et les incertitudes nombreuses : ces territoires disparaîtront-ils totalement ? Quelles solutions d’accueil prévoir ?

    Des négociations existent déjà avec l’Australie ou la Nouvelle-Zélande pour organiser des migrations de travail ou des mécanismes de protection. Mais cela demeure limité et très éloigné de l'ampleur des crises internes, insiste Benoit Mayer : « Quand on parle du Bangladesh, on parle de centaines de millions de personnes. Ça me semble être un problème beaucoup plus important ».

    Le cas des îles du Pacifique pose aussi des questions existentielles: comment préserver des patrimoines immatériels — langues, mémoires, paysages, odeurs — menacés de disparition avec le territoire lui-même ?

    Ces enjeux dépassent cependant le strict cadre du droit international. En réalité, la quasi-totalité de la question des réfugiés climatiques relève du droit interne des États, puisqu’il s’agit majoritairement de déplacés dans leur propre pays.

    Quant à la Convention de Genève, aucun bouleversement n’est envisagé. Outre les difficultés conceptuelles, aucun État ne souhaite rouvrir un texte fondamental dans un contexte géopolitique tendu avec le risque de se retrouver avec un régime moins protecteur qu’en 1951.

    À écouter aussiDisparition des Tuvalu avant 2100: le compte à rebours a commencé

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  • Dix ans après l’accord de Paris, la justice climatique s’impose comme un pilier de l’action mondiale
    2025/12/03

    L'année 2025 marque les dix ans de l’accord de Paris, mais un autre anniversaire, presque aussi déterminant pour la lutte contre le réchauffement, passe plus discrètement : celui de la première grande victoire de la justice climatique. En 2015, aux Pays-Bas, l’ONG Urgenda obtenait d’un tribunal une décision inédite : obliger un État à rehausser son ambition climatique. Éclairage.

    Dix ans après cette décision prise par la cour de la Haye, aux Pays-Bas, c'est une véritable architecture juridique internationale. Des juges en Allemagne, en Colombie, en France ou en Corée du Sud, mais aussi des juridictions régionales comme la Cour européenne et la Cour interaméricaine des droits de l’homme, jusqu’à la Cour internationale de Justice, appuient désormais la même idées : les États ont l’obligation légale de protéger leurs populations contre les impacts du changement climatique. Cette obligation implique qu’ils se fixent des objectifs cohérents avec la science, qu’ils prennent des mesures réelles pour les atteindre et qu’ils répondent de leurs manquements. Dix ans après l’affaire Urgenda, ces décisions ont façonné une sorte de « droit global du climat » construite affaire après affaire.

    Ces décisions produisent en effet des résultats très concrets : en Allemagne, la Cour constitutionnelle a jugé que les politiques climatiques prévues ne suffisaient pas à protéger les générations futures, ce qui a conduit le gouvernement à réécrire son plan climat et à renforcer les mesures dans les secteurs du transport et du bâtiment. Au Brésil, une décision de la Cour suprême a forcé l’exécutif à réactiver le Fonds climat, resté inopérant pendant plusieurs années et à y consacrer de nouvelles ressources. Aux Pays-Bas, le gouvernement, sommé de respecter les objectifs imposés par l’affaire Urgenda, a accéléré la fermeture des centrales à charbon. Et dans plusieurs pays comme l’Australie ou le Royaume-Uni, des tribunaux ont suspendu ou annulé des projets d’exploitation fossile après avoir jugé leurs impacts climatiques incompatibles avec les engagements internationaux.

    Des conséquences pour les investissements privés

    La justice climatique ne concerne toutefois plus seulement les États, mais également le secteur privé. De plus en plus de communautés affectées par le réchauffement climatique tentent d’engager la responsabilité de grands groupes émetteurs. Selon Sarah Mead, codirectrice du Climate Litigation Network, qui vient de publier un rapport sur le sujet : Laying the foundations for our shared future - Climate Litigation Network ONLINE.pdf - Google Drive, « on voit apparaître de nouveaux cas partout dans le monde ».

    En Allemagne, des agriculteurs pakistanais ont récemment assigné l’énergéticien RWE, estimant que ses émissions ont contribué aux inondations qui ont dévasté leurs terres. Cette affaire s’inscrit dans la continuité d’un autre dossier emblématique : celui de Saúl Luciano Lliuya, un fermier péruvien qui a obtenu d’un tribunal allemand la reconnaissance du principe selon lequel une entreprise peut être tenue responsable des conséquences ses émissions, même lorsque les dommages surviennent à l’autre bout du monde.

    « Ces cas illustrent le fait que de plus en plus de communautés touchées par les conséquences du réchauffement veulent être dédommagées par le siège de grandes entreprises des pays occidentaux. Je pense que ça change la donne », poursuit Sarah Meade. La multiplication de ces litiges judiciaires et la menace de lourds dommages et intérêts à acquitter par les entreprises visées font en effet peser un risque financier non négligeable quant à la poursuite de leurs activités. « La Banque centrale européenne commence à considérer ces affaires comme un risque financier réel pour ces entreprises », ajoute-t-elle.

    Plusieurs groupes du secteur des énergies fossiles ont ainsi augmenté leurs provisions pour risques climatiques, sous la pression de ces procédures et de leurs investisseurs. Selon la dernière étude des Nations unies publiée en 2023, le nombre d’affaires judiciaires liées au changement climatique a plus que doublé depuis 2017. Plus de deux mille dossiers sont aujourd’hui ouverts dans le monde. Un chiffre en croissance constante, en particulier depuis cinq ans.

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  • Les experts du Giec réunis à Paris: quels sont les enjeux?
    2025/12/02

    La France accueille toute la semaine près de 600 scientifiques du Giec, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat. Les auteurs principaux du rapport se réunissent pour entamer les travaux en vue du 7ᵉ rapport d'évaluation du Giec. Et pour la première fois, les trois groupes de travail se réunissent en même temps en ce début de cycle.

    Le Giec est constitué de trois groupes de chercheurs. Le premier se consacre aux études physiques, c'est-à-dire à l'évolution du climat et aux causes du réchauffement, le deuxième s'occupe de son impact et des questions d'adaptation et le troisième se penche sur l'atténuation du réchauffement. Habituellement, les travaux sont menés par groupe de travail. Cette fois, le processus a changé.

    À quelques jours du 10ᵉ anniversaire de l'accord de Paris, la France dit ainsi vouloir apporter une « forme de soutien politique » aux travaux du Giec. Une marque de soutien à une période où les sciences du climat subissent des attaques, décochées notamment par Donald Trump, le président américain.

    Cela n'empêche pas des scientifiques américains — nommés par des observateurs — de participer à cette réunion. Selon l’AFP, plus d’une cinquantaine de scientifiques américains auraient fait le déplacement. Pour les scientifiques précisément, l'objectif de cette semaine, c'est de mieux se coordonner sur certaines thématiques et de gagner ainsi en efficacité et de fournir « des éléments qui aideront » nos dirigeants « à prendre des décisions plus justes », espère un chercheur.

    De nouvelles données

    Plusieurs sujets doivent être étudiés de manière transversale. C'est le cas de la question du dépassement de certains seuils climatiques. La question de savoir comment on pourrait faire baisser la température devrait être posée et cela aurait des implications dans divers groupes.

    À lire aussiL’IPBES, «Giec de la biodiversité», prône des réponses globales et décloisonnées aux crises

    Par ailleurs, il devrait y avoir un certain nombre de mises à jour. Les rapports du Giec font une sorte de synthèse des avancées scientifiques. Depuis le précédent rapport, de nombreux événements climatiques extrêmes se sont produits dans le monde et les connaissances s'affinent. Par ailleurs, les chercheurs disposaient de peu de données sur les événements extrêmes survenus dans certaines régions du monde. Elles sont désormais plus fournies, notamment pour l'Afrique. La littérature scientifique s’est également étoffée sur le dossier de l’adaptation.

    Calendrier incertain

    Mais pour connaître le résultat, il faudra être patient. Le rapport devrait paraître en 2028 ou 2029. Le compte rendu scientifique devra être approuvé par consensus de l'ensemble des pays membres. « Et si un pays, quel qu'il soit, s'oppose au compte rendu, il ne peut pas être approuvé. Chaque pays a une sorte de droit de veto », expliquait vendredi le coprésident du Groupe 1 du Giec, Robert Vautard, lors d'une visioconférence avec la presse. Mais de préciser qu’il existe des procédures pour approuver le texte si le pays en question est isolé. Il serait alors précisé qu’un pays n’est pas d’accord et pourquoi il ne l’est pas.

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  • Comment répondre à la crise du vivant?
    2025/11/27
    Alors que la biodiversité s'effondre et que de nombreux écosystèmes sont menacés, 117 scientifiques et experts du monde entier se réunissent à Paris. Ils ont été choisis par l'IPBES (la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques, aussi appelé le « GIEC de la biodiversité »). Et ils ont une tâche cruciale à accomplir, à savoir : écrire la deuxième évaluation mondiale sur la biodiversité et les services que nous rendent les écosystèmes. En 2019, la publication par l’IPBES de la toute première évaluation mondiale sur la biodiversité et les services écosystémiques avait réveillé les consciences : l'opinion publique mondiale apprenait alors que plus d'un million d'espèces végétales et animales étaient menacées d'extinction et qu'un tiers des écosystèmes ne pouvaient plus abriter leur faune et flore originelles. Et tout cela à cause de l'activité humaine. Depuis, de nombreux pays ont mis en place des stratégies et politiques publiques pour renverser ce déclin dramatique. Au niveau international aussi, les pays tentent de coopérer davantage pour protéger le vivant. Mais force est de constater que ce n'est pas encore suffisant. « Nous consommons toujours plus » « Nous ne prenons toujours pas les bonnes décisions », déplore le Kényan David Obura, président de l’IPBES et lui-même scientifique reconnu pour ses travaux sur les écosystèmes marins. « Ces dernières années, les pressions sur la nature ont continué d'augmenter. Principalement parce que nous continuons de consommer toujours plus. Nous ne changeons pas encore suffisamment nos habitudes. Nous devons absolument comprendre comment aligner nos comportements sur la durabilité de la planète ». C’est précisément l’objectif du deuxième bilan mondial sur la biodiversité sur lequel ont commencé de travailler cette semaine à Paris des centaines de scientifiques et experts du monde entier. Ils ne doivent pas seulement faire un état de lieu des espèces animales et végétales sur notre planète, souligne le Sud-Africain Luthando Dziba, le secrétaire exécutif de la plateforme, mais aussi « examiner les facteurs directs et indirects responsables de la perte de biodiversité et rendre compréhensibles les services de la nature qui améliorent notre qualité de vie. Un chapitre sera aussi consacré aux scénarios basés sur les mesures déjà prises, et encore un autre explorera les futures options politiques ». À écouter aussiIPBES : nous ne pouvons plus dire que nous ne savons pas... L’accès aux données scientifiques s’est amélioré Les experts auront près de trois ans pour synthétiser des données scientifiques du monde. Cette synthèse doit être fiable et surtout compréhensible car elle servira à faire des recommandations pour les décideurs politiques et les acteurs locaux à travers le monde entier. C’est un travail titanesque. D’autant plus que « la disponibilité des données sur la biodiversité s'est nettement améliorée », constate David Obura. « Le nombre de données a doublé en cinq ans, notamment grâce au déploiement des systèmes à distance comme les drones, les satellites ou les capteurs. Il y a donc bien plus d'informations, mais nous devons maintenant les traiter et les comprendre ». Les connaissances autochtones prennent toute leur place Ces informations disponibles ne proviennent d’ailleurs plus seulement des sciences dures. « Un chapitre entier sera consacré aux connaissances autochtones, qui se sont développées au fil des millénaires et qui permettent aux peuples autochtones de tirer profit des ressources que leur offre la nature sans l'abimer », annonce Luthando Dziba qui prédit que ces connaissances autochtones vont « enrichir notre compréhension de nos écosystèmes et améliorer notre capacité à mieux les gérer ». Une publication en 2028 La deuxième évaluation mondiale sur la biodiversité et les services écosystémiques sortira en 2028. D'ici là, l'IPBES s'apprête à publier un autre document qui fera couler beaucoup d'encre. Ce sera en février de l'année prochaine. Un travail scientifique de premier plan qui démontrera l'impact des entreprises sur la biodiversité, alors que plus de la moitié du produit intérieur brut mondial dépend de la nature. À lire aussiL’IPBES, «Giec de la biodiversité», prône des réponses globales et décloisonnées aux crises
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  • Comment la grippe aviaire tue les éléphants de mer?
    2025/11/26

    Depuis 2022, la plus grande vague de ce virus jamais documentée sévit sur plusieurs continents. Le H5N1, de son nom scientifique, ne touche pas seulement les oiseaux sauvages et la volaille, car ces derniers sont capables de le transmettre à des mammifères. Le dernier épisode qui fait couler beaucoup d'encre, c'est celui qui ravage les populations d'éléphants de mer dans l'Atlantique Sud.

    Les éléphants de mer sont la plus grande espèce de phoques. Les mâles peuvent atteindre une longueur de six mètres et demi et peser plus de trois tonnes. Ce sont habituellement des animaux solitaires, sauf au moment de la reproduction. Et c'est là que le H5N1 a frappé.

    « Il s'agit d'un virus transmis par voie aérienne », explique Connor Bamford, écologiste marin au Centre de recherche britannique en Antarctique. « Les gouttelettes infectées se propagent d'un animal à un autre. C'est particulièrement problématique au moment de la reproduction en octobre, quand les éléphants de mer viennent à terre et forment d'immenses colonies très denses. Ce sont les conditions idéales pour que le virus se propage facilement au sein de leur population ».

    En Géorgie du Sud, la moitié des femelles reproductrices manquent à l'appel

    Le territoire étudié par Connor Bamford, c'est la Géorgie du Sud. Cette île de 3 700 km2, à 1 700 kilomètres de la Terre de Feu au large de l'Argentine, abrite plusieurs colonies d'éléphants de mer. Des dizaines de milliers de femelles y viennent chaque année pour mettre bas puis s'accoupler de nouveau avant de reprendre la mer. Le premier oiseau migrateur porteur du H5N1 y était découvert en septembre 2023. Les scientifiques s'attendaient alors à un fort impact de la grippe aviaire sur les grands mammifères. Mais ils étaient loin de s'imaginer ce qu'ils allaient découvrir un an plus tard.

    « Quand nous sommes arrivés sur les plages, il était évident qu'il y avait quelque chose de différent. Quelque chose n'allait pas du tout ! Normalement, quand on marche le long de la ligne de déferlement des vagues, on a du mal à se frayer un chemin entre les animaux pour arriver jusqu'au fond de la plage. Mais en 2024, il y en avait tellement moins que ça sautait aux yeux ! Alors nous avons recommencé les vols de drones qu'on avait déjà entrepris en 2022. Et nous avons constaté qu'en moyenne 47% des femelles reproductrices manquaient à l'appel ». 47% cela correspond à 53 000 femelles.

    La population mondiale des éléphants de mer affectée

    L'impact à long terme est encore difficile à évaluer pour les scientifiques. Puisque « la population d'éléphant de mer en Géorgie du Sud est la plus grande au monde » souligne Connor Bamford. « Lors du dernier recensement en 1995, elle représentait un peu plus de la moitié de la population mondiale. Et donc la moitié de ces éléphants de mer sont morts à cause de la grippe aviaire entre 2023 et 2024, ce qui fait un nombre considérable d'animaux ! La population mondiale d'éléphants de mer va en souffrir au moins jusqu'à la fin du siècle ».

    D'autant plus que les nouvelles en provenance d'autres territoires ne sont guère encourageantes. Sur la presqu'île de Valdès en Argentine, 97% des bébés éléphants de mer ont été décimés par le virus l'an dernier. Et ces jours-ci, les scientifiques français rapportent une mortalité inhabituelle des éléphants de mer sur les îles Kuerguelen.

    L'impact sur l'écosystème marin pas encore mesurable

    Une véritable hécatombe qui touchera inévitablement d'autres espèces. En tant que prédateurs redoutables, les éléphants de mer se placent tout en haut de la chaine alimentaire. Mais ils jouent aussi un rôle nourricier : comme ils plongent jusqu'à deux kilomètres de profondeur, ils répandent leurs matières fécales dans les différentes couches des océans, ce qui profite aux autres organismes. Un déclin brutal des éléphants de mer aura donc un impact sur l'ensemble de l'écosystème marin, dont on peine encore à mesurer l'ampleur.

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