エピソード

  • Environnement: l'Afrique brûle en permanence
    2025/04/24
    Le continent africain concentre les deux tiers des incendies de la planète. Principale cause : la culture sur brûlis, avec des conséquences pour l'environnement et la santé humaine. C'est une réalité qui passe sous les radars de l'information : l'Afrique brûle en permanence. On le sait grâce à plusieurs satellites d'observation qui détectent, notamment, les nuages de monoxyde de carbone, le gaz issu de la combustion. Les cartes quotidiennes des incendies sont éloquentes, quasiment en temps réel – il faut deux ou trois heures pour que les données arrivent sur Terre et soient traitées. Des cartes accessibles par tous ici ou ici.Un nuage rouge, certains jours impressionnant, recouvre l'Afrique d'est en ouest, entre la bande sahélienne et l'Afrique centrale. « Il n’y a pas un jour de l'année où je n'ai pas des incendies en Afrique. C'est en permanence, témoigne Cathy Clerbaux, directrice de recherche au CNRS, qui travaille sur le suivi de la composition de l'atmosphère, grâce aux données d'un satellite européen, IASI. C'est d'ailleurs toujours un peu bizarre pour nous parce que quand il y a des incendies importants quelque part en été, on en parle beaucoup. Par exemple les feux en Californie, ou ceux de Los Angeles en janvier dernier, qui détruisent des maisons. Mais en fait, vu du satellite, les feux les plus importants sont de loin les feux qui se produisent en permanence en Afrique, et en Amazonie à certaines périodes ».Deux fois plus d'incendies en vingt ansLe continent africain concentre à lui tout seul 70% des incendies recensés sur la planète, avec plus de 4 millions de kilomètres carrés brûlés chaque année. En 20 ans, le nombre d'incendie a doublé en Afrique de l'Ouest et en Afrique centrale, en particulier dans le bassin du Congo. Mais la plupart de ces incendies ont une particularité ; ils sont volontaires et maitrisés, sur de petites surfaces. C'est ce qu'on appelle la culture sur brûlis, le principal mode d'agriculture dans les zones tropicales humides. Avant la saison des pluies, « toutes les fins de cultures sont brûlées, parce que c'est la manière de remettre la terre en état pour planter la culture suivante la plus facile à mettre en œuvre et la plus économique, sûrement pas la moins polluante. Mais ça nourrit les sols », explique Cathy Clerbaux.Une pratique ancestrale, qui remonte à la préhistoire, il y a des milliers d’années, parce que l’Homme s’est rendu compte que la cendre était un excellent engrais naturel, riche en carbone et en minéraux – les plantes adorent. Le problème, c'est qu'on brûle de plus en plus de forêts pour défricher et ensuite cultiver. Et ces feux de forêt rejettent dans l’atmosphère du CO2, le principal gaz responsable du réchauffement climatique. Une forêt disparue, c'est un puit de carbone en moins. Depuis peu, d’ailleurs (mais pas seulement à cause des incendies), l'Afrique émet plus de CO2 qu'elle n'en absorbe.À lire aussiCultures sur brûlis, feux et charbonnage...: ces fumées qui empoisonnent les MalgachesFumées toxiquesDernier problème, la pollution de l'air, qu’on respire. La fumée des incendies est particulièrement toxique. « C'est probablement le cocktail de gaz le plus dangereux que vous puissiez imaginer, avec une trentaine de molécules différentes, assure Cathy Clerbaux. Le monoxyde de carbone, c'est la plus facile à voir par satellite. Il y a surtout les particules de suie qui sont très impactantes pour les poumons. C'est au moins aussi dangereux que de fumer des cigarettes si vous vous retrouvez dans ces régions-là du monde. S’ils ont un problème pour nourrir leur population, probablement que la pollution vient dans un deuxième temps ».Un chiffre pour comprendre l'étendue du problème : l'Afrique subit en moyenne chaque année 32 jours d'exposition importante aux particules fines nocives provoquées par les incendies – en Europe, c'est un seul jour par an.. Mais ce n'est pas parce qu'on est loin qu'il faut se croire à l'abri. Ces particules toxiques, le vent les transporte parfois sur des milliers de kilomètres.À lire aussiÀ Madagascar, la côte est en proie à d’intenses feux de brousse et de forêt
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  • Pourquoi l'écologie politique est-elle née dans les années 1970?
    2025/04/23
    La première Journée de la Terre a eu lieu en 1970, au début d'une décennie marquée par l'émergence des questions environnementales dans le débat public. La publication du rapport Meadows sur les limites de la croissance provoque un choc dans les consciences écologiques. Elle marque les esprits, la première Journée de la Terre, organisée uniquement aux États-Unis, le 22 avril 1970. Des millions d'Américains participent à des manifestations, et la chaîne de télé CBS diffuse une émission spéciale intitulée « Une question de survie ». À l’origine de ce « Earth Day », un sénateur démocrate : Gaylord Nelson, choqué un an plus tôt par une marée noire sur les côtes californiennes. Aux États-Unis, comme en Europe, les marées noires se multiplient sous l’effet de l’intensification du commerce pétrolier. Et évidemment, les images choquent les populations. « Une marée noire, c'est spectaculaire, souligne François Jarrige, historien de l'environnement. Les pollutions étaient invisibles, mais là, il n’y a pas de débat : les oiseaux sont mazoutés, les habitants des littoraux voient les nappes de pétrole sur les côtes. Il y a une sorte d'immédiateté, d'évidence, de la nuisance. »Le choc du rapport MeadowsLe début des années 1970 marque la fin des « Trente glorieuses », cette période de croissance économique ininterrompue depuis l’après-Seconde Guerre mondiale dans les pays occidentaux développées, mais on ne le sait pas encore. Un an avant le premier choc pétrolier, un rapport choc est publié en 1972 par le Club de Rome, qui rassemble des scientifiques, des économistes et des industriels : Les Limites de la croissance, connu aussi comme le rapport Meadows, du nom de ses deux principaux auteurs, Donella et Dennis Meadows. Ces deux chercheurs au MIT s’appuient sur des superordinateurs et la dynamique des systèmes pour élaborer des scénarios prédictifs – et catastrophiques. Le constat est simple : la croissance économique (et démographique) entraîne l’épuisement inéluctable des ressources de la planète.« Il faut prendre conscience des réalités, prévient à l’époque le fondateur du Club de Rome, Aurelio Peccei. Si nous ne sommes pas capables de faire cela, alors je pense que les souffrances humaines seront presque infinies. » C'est l'apocalypse qui vient, et le rapport fait l’effet d’une bombe. C’est un carton en librairie : 12 millions d'exemplaires vendus en 37 langues. « Il a vraiment un impact planétaire, confirme l’historien François Jarrige. Quand vous ouvrez les quotidiens et les journaux de l'époque, les alertes du Club de Rome sont largement reprises, débattues. Le rapport Meadows rompt avec la confiance antérieure dans une sorte d'expansion continue et infinie. Ce rapport frappe les contemporains parce qu'il donne du sens à ce qui arrive à l'époque, et notamment la dépendance croissante à l'égard des énergies fossiles. »À lire aussi«Avons-nous atteint, voire dépassé les limites planétaires?»Mai-68 et les nouveaux mouvements sociauxLa prise de conscience de la fragilité du monde irrigue la société. Et les artistes s’en font les relais, à l’image du chanteur américain Marvin Gaye, et de son tube « Mercy, mercy me (The Ecology) » (soit « Pitié, par pitié (l’écologie) » – où il s’inquiète de la pollution des océans et des poissons empoisonnés au mercure. À l’été 1971, le titre est numéro 1 aux États-Unis. À l’époque, les alertes ne sont pas focalisées sur le réchauffement climatique comme aujourd’hui, mais sur les pollutions.Pour autant, la conscience écologique ne date pas d’hier ni d’avant-hier. « Je pense qu’il très important de casser cette idée que l'écologie serait une préoccupation récente », estime François Jarrige, qui rappelle que le mot « écologie » apparait à la fin du XIXème siècle, avec la Révolution industrielle. À la même époque, d’ailleurs, un scientifique suédois, Svante Arrhenius, découvre l’effet de serre et établit le lien entre CO2 et température planétaire.« Ce qui se passe dans les années 1970, c'est qu'on va assister à une démocratisation de ce langage au-delà du champ scientifique. Les années 1970 marquent moins l’émergence de la conscience écologique que la naissance de l’écologie politique », résume François Jarrige.Les seventies signent la fin de l'âge d'or économique. Et dans le sillage de Mai-68, les lignes bougent en Occident. « On sort d'une période, d'une génération, où la question environnementale avait été un peu invisibilisée par l'expansion économique, l'enrichissement généralisé, constate encore François Jarrige. Mai-68 ouvre l'émergence de ce qu'on va appeler à l'époque les nouveaux mouvements sociaux, sur les questions de féminisme, de genre, et la question écologique. Le début des années 1970, c'est le ...
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  • François était-il un «pape vert»?
    2025/04/22

    Parmi les combats politiques menés pendant les 12 ans du pontificat du chef de l'Église catholique, décédé lundi 21 avril, la défense de l'environnement occupait une place centrale. Le pape François a usé de toute son influence pour peser sur la diplomatie du climat.

    Le premier « pape vert » de l’histoire du Vatican n’était pas le pape François, mort lundi à l’âge de 88 ans, mais son prédécesseur. Le pape Benoit XVI, pourtant beaucoup plus conservateur, avait hérité de ce surnom de « pape vert » parce qu’il considérait que la destruction de l'environnement était un péché, et parce qu’il avait aussi fait installer des panneaux solaires au Vatican… Avant lui, d’ailleurs, d'autres chefs de l'Église catholique, Jean-Paul II et Paul VI, avaient exprimé leurs préoccupations pour l'avenir de la planète Terre, l'œuvre du « Créateur ».

    Mais le pape François, lui, est allé plus loin, et pas seulement parce qu'il a engagé le Vatican sur la voie de la neutralité carbone, qu'il a créé une ferme écologique ou qu’il roulait ces derniers en papamobile 100 % électrique. François impulse le grand tournant de l'Église catholique sur l'écologie en publiant en 2015 une encyclique entièrement consacrée au climat et à l'environnement, Laudato si (« Loué sois-tu »), où il développe le concept d'écologie intégrale : les questions environnementales, sociales, économiques et politiques sont liées.

    Diplomate du climat

    Ce discours éminemment politique, le pape François vient l’appuyer quelques mois plus tard, à la tribune des Nations-Unies à New-York. « Le changement climatique est un problème qu'on ne peut plus laisser aux générations futures », lance-t-il dans un anglais un peu vert. Nous sommes en septembre 2015, quelques semaines avant la COP21, le grand sommet mondial sur le climat organisé à Paris. Et c'est cet agenda que le pape François a en tête. Le président français François Hollande, qui s’apprête à accueillir la COP21, l’en remercie. Le 12 décembre 2015, l'accord de Paris est signé, un accord historique pour tenter de limiter le réchauffement climatique à 1,5° C, tout au plus à 2° C.

    Les prises de position du pape François ont-elles pesé ? C'est la conviction de Dominique Lang, journaliste français à Pèlerin qui rappelle que l’encyclique écologique Laudato si « a été publiée six mois avant la COP21 avec une prétention presque explicite de toucher les cœurs et les consciences des responsables politiques de l'époque. Et on a vu que probablement cela a fait le travail, puisqu’au moment de la signature de la COP21, un certain nombre de ces responsables ont remercié le pape François d'avoir publié ce texte. »

    Le pape au mégaphone

    Le pape François, acteur de la diplomatie climatique, c’est la même stratégie qu’il adopte pour la COP28, à Dubaï en 2023. Quelques mois avant le sommet mondial pour le climat, il publie un nouveau texte, plus court, mais plus grave aussi, eu égard à l’urgence climatique, Laudate Deum (« Louez Dieu »). Et s'il renonce à se rendre physiquement à la COP28, pour des raisons de santé déjà, il envoie un message dans lequel il appelle à l'abandon des énergies fossiles, et c'est une première pour le Vatican. Le pape François met les pieds dans le plat de pétrole émirien et fustige « des négociations internationales qui ne peuvent pas avancer de manière significative en raison de la position des pays qui mettent leurs intérêts nationaux au-dessus du bien commun général ».

    Son vocabulaire n’est pas celui du libéralisme écologique : contre la finance, les multinationales, l'égoïsme des pays riches, la surconsommation. Son pontificat, il l’a décidé, sera politique. « Pour lui, abîmer l'environnement, c'était comme abîmer l'humanité, accroître les injustices, témoigne l’une de ses biographes, Francesca Ambrogetti. Je me souviens d'une de ces phrases, à ses débuts, il souhaitait dire les mêmes choses que l'on entendait habituellement, mais avec un mégaphone. » François, le pape au mégaphone, soutient la désobéissance civile, encourage Greta Thumberg, la militante du climat, ou encore apporte son soutien aux activistes qui luttent contre le projet pétrolier de Total en Ouganda. Oui, François était un pape vert.

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  • Qui sont les dirigeants de l'internationale climatosceptique?
    2025/04/21
    De l'Américain Donald Trump au Russe Vladimir Poutine, en passant par l'Argentin Javier Milei, petit tour d'horizon des chefs d'État ou de gouvernement qui remettent en cause la réalité du changement climatique en s'appuyant sur des discours populistes et réactionnaires. C’est le premier visage de l’internationale climatosceptique, et il est orange. Le visage de Donald Trump, ennemi du climat, dès son premier mandat. « Climatodénialiste », le président des États-Unis nie la responsabilité des activités humaines dans la crise climatique, capable d’affirmer : « Ça finira par se refroidir, vous verrez. Les scientifiques ne le savent pas en réalité. » Depuis son retour à la Maison-Blanche, il y a trois mois et un jour, c'est une litanie de coups portés contre l'environnement et les politiques climatiques : du retrait des États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat jusqu'à la reprise de la pêche dans un sanctuaire de l'océan Pacifique annoncée il y a quelques jours.Le président des États-Unis a fait des petits, il a ses adeptes. Notamment sur le continent sud-américain. Après la parenthèse Jair Bolsonaro, président du Brésil entre 2019 et 2022, Javier Milei a pris le relai à la tête de l’Argentine depuis quatre mois et demi. L’homme, célèbre pour brandir une tronçonneuse à tout bout de champ, n’a pas encore menacé de s'en servir pour couper des arbres, mais il est un climatodénialiste assumé quand il affirme que le réchauffement climatique est « un mensonge des socialistes » : « Tous ces politiques qui accusent l'Homme d'être responsable du changement climatique sont bidons. »À lire aussiLutte contre le réchauffement climatique: Donald Trump en arrière touteLe climatoscepticisme est un populismeAu sein de l’internationale climatosceptique, il y a aussi Vladimir Poutine. Sous le règne du présent russe, les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de 23 % depuis 2000. L’économie russe est fossilisée. Au Kremlin, on se réjouit de la fonte du permafrost, les terres gelées de Sibérie, pour exploiter les minerais et les hydrocarbures.En Inde, le Premier ministre Narendra Modi surfe sur l'ambiguïté, lui qui avait boycotté la COP29, le dernier sommet mondial pour le climat. L'Indien jongle entre charbon et solaire pour assurer le développement économique du pays le plus peuplé au monde. On peut aussi citer en Europe le Premier ministre hongrois Viktor Orban.Tous ces ennemis du climat ont quelques points communs : pas très démocrates, pas très libéraux. Nationalistes et populistes, car le climatoscepticisme est un populisme. « On disait souvent, il y a quelque temps, que l'écologie, c'est terrible, ça donnera des régimes autoritaires, verts – les fameux Khmers verts. Or ce qu'on voit, c'est totalement l'inverse avec des régimes réactionnaires, estime Albin Wagener, enseignant-chercheur en sciences politiques à l'Université catholique de Lille. Quand l'écologie touche à la manière dont on se déplace, dont on s'alimente, dont on se loge, etc., cela donne l'impression que l'écologie attaque finalement tous les pans de la vie. De ce fait-là, on a effectivement une réaction, une volonté de ne pas se laisser emporter par ça. Et c'est ce qui fait que les discours climatodénialistes, ou climatosceptiques en tout cas, ont le vent en poupe en ce moment. C'est vraiment une peur de perdre un monde qui est en train de s'éteindre. »À lire aussiCOP26: la Russie, absente à Glasgow, change de discours sur le climatLe chacun pour soiL'internationale climatosceptique a un poids, et d’abord le poids immense des États-Unis. Auquel s’ajoutent les menaces de Donald Trump, même quand la première puissance mondiale choisit de boycotter les institutions multilatérales, comme ce fui le cas récemment sur la mise en place d'une taxe carbone pour les navires de commerce.Tous les dirigeants de l’internationale climatosceptique n'ont pas forcément les mêmes intérêts, mais forment de fait une alliance objective. « Tout le programme de l'internationale réactionnaire, c'est de sortir graduellement des coopérations internationales, explique Albin Wagener. C'est du chacun pour soi, ce qui maintenant fait patiner des organisations comme la COP par exemple. Et à partir de là, effectivement, cela va peser de manière assez dramatique puisque le principe du multilatéralisme, c'est que les grands États essaient de protéger les petits. Or là, c'est fini, c'est vraiment du chacun pour soi. »L’Afrique ne compte pas de dirigeants ouvertement climatosceptiques. Ils sont en revanche soucieux du développement économique, d’où la multiplication des projets d’exploitation d’énergies fossiles. Pour autant, la crise climatique n’est évidemment pas le fait de l’Afrique.En France, une partie de la droite et l’extrême droite appuie sur la corde sensible du climatoscepticisme, alors que ...
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  • Combien d'animaux sont tués sur les routes?
    2025/04/17
    Un animal passé sous les roues d'une voiture, c'est généralement passé sous silence, tant les cas sont nombreux et se chiffrent en centaines de millions chaque année dans le monde entier. Mais des solutions existent pour protéger la faune de la violence routière. C'est une hécatombe passée sous silence : la mortalité routière chez les animaux. Rien qu'en Europe, rien qu'en une année, plus de 200 millions d'animaux sont tués. Et il ne s'agit là que des vertébrés, c'est-à-dire qu'on n'a pas compté les vers de terre ni les insectes collés au pare-brise des voitures – ils sont, c'est vrai, de moins en moins nombreux.Dans le détail, on estime que 194 millions d'oiseaux et 29 millions de mammifères meurent chaque année sous les roues des voitures, des camions – beaucoup plus rarement sous les roues des vélos. Les premières victimes sont les merles et les pipistrelles, une espèce de chauve-souris.« Chaque semaine sur mon trajet d'une vingtaine de kilomètres pour me rendre au travail, il y a des animaux morts, témoigne Benoit Thomé, le président de l'association de défense des animaux Animal Cross, basée à Pau, dans le sud-ouest de la France. Dès lors que vous quittez le centre des villes, vous en voyez partout. Comme si c'était une fatalité, on s'est habitué à ce que des animaux meurent sous nos voitures et que les routes soient devenues des cimetières pour les animaux ». À titre personnel, on a vu il y a quelques semaines dans le sud de la France, un soir sur un trajet d'une quarantaine de kilomètres seulement, trois hérissons écrasés. Ils se croient protégés avec leurs piquants, qui ne peuvent pourtant pas grand-chose face aux roues d'une voiture.Trop de routesEn début d'année, dans le département français de Mayotte, dans l'océan Indien, après le passage du cyclone qui a abattu de nombreux arbres, une mortalité sans précédent a touché les makis, des lémuriens. « Avant, pour traverser les routes, ils passaient par les arbres. Et maintenant, il n’y a plus d’arbres, donc ils sont obligés de passer par le sol, par la route, où passent les voitures, racontait Emilien Dautrey, de l'association Gépomay. On en voit tous les jours écrasés, ça se compte par centaines, et ça, c’est triste ».Mais hormis des circonstances exceptionnelles comme celles d'un cyclone, pourquoi y-a-t-il autant de mortalité routière pour les animaux ? Tout simplement parce qu'il y a trop de routes. Sur la moitié du continent européen, où qu'on soit, on se trouve à moins de 1,5 km d'une route ou d'une voie ferrée.Est-ce les animaux qui traversent les routes, ou les routes qui traversent le territoire des animaux ? « Du point de vue des animaux, ils sont chez eux en fait. Et c'est la route qui vient traverser leur forêt, leurs champs, répond Benoit Thomé, de l'association Animal Cross. La question des collisions avec la faune sauvage est même une vraie question philosophique sur le partage du territoire ». Et on a bien compris que l'homme n'aime pas trop partager...On assiste pourtant depuis quelques années à une prise de conscience face à cette hécatombe. Pour protéger les animaux des voitures, on installe ce qu'on appelle des écoducs, des viaducs écologiques, ponts ou tunnels. Les États-Unis construisent le plus grand au monde, à Santa Monica en Californie, pour traverser dix voies d'autoroute.Ecuducs et crapauducsIl existe des ouvrages beaucoup plus modestes, comme celui qu'on était allé voir dans l'ouest de la France, en Charente-Maritime, sous une petite route, pour protéger les visons d'Europe, une espèce de petit mammifère au bord de l'extinction. « Là on est sur une route qui passe au milieu des marais de Rochefort, et on a deux visons d’Europe qui ont été écrasés, victimes d’une collision routière. Il est donc important de pouvoir agir sur cette menace, expliquait Ingrid Marchand, en charge du programme Life Vison pour la LPO, le son de sa voix quasi couvert par le bruit d'une voiture passant alors en trombe. On a ici un ponton flottant, sous le pont routier, pour permettre à l’individu d'éviter de passer sur la route ». Passer sous le pont plutôt que sous les roues des voitures. Les conséquences de la mortalité routière sont évidemment encore plus tragiques quand elle touche des espèces déjà menacéesOn construit aussi des écuducs, pour les écureuils, ou des crapauducs, pour les amphibiens. On n'hésite plus non plus désormais à couper la route, pendant quelques jours, pour permettre aux grenouilles de sortir du bois à la fin de l'hiver et rejoindre de l'autre côté de la chaussée une mare ou étang où elles vont se reproduire. En Normandie, y a quelques semaines, on a ainsi évité la mort de 2 000 amphibiens. Une goutte d'eau, peut-être. 2 000, c'est peu, mais ça promet beaucoup de naissances.
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  • Quel est le secret insoupçonné du caca?
    2025/04/16

    Les déjections humaines contiennent phosphore et azote, des éléments nécessaires aux plantes. Nos excréments sont des engrais naturels, utilisables en agriculture.

    C'est une chronique un peu pipi-caca aujourd'hui... Mais ce n'est pas sale, puisqu'il s'agit d'engrais naturel. Nos excréments sont plein de phosphore. Et le phosphore, les plantes l'adorent, pour leur développement et leur croissance, au même titre que l'azote et le potassium. Le phosphore « est l'un des rouages de la réalisation de la photosynthèse, explique l'agronome Christophe Gatineau. Si les plantes n'ont pas accès au phosphore, elles sont ce qu'on appelle victimes de nanisme. Elles vont certes pousser, mais pousser pour se reproduire au plus vite. En tout cas, ce ne sont plus des plantes qui nourrissent ».

    Sans phosphore, pas d’agriculture nourricière. En agriculture conventionnelle, on utilise justement des engrais à base de phosphate. Alors qu'il existe une solution plus naturelle. Vous comme moi, tout le monde produit du phosphore, et c’est ce que défend Christophe Gatineau, l'auteur du livre Ne tirons plus la chasse (éditions Ulmer). On trouve normal d’utiliser l’eau du robinet pour les toilettes et évacuer ses déjections, alors que 9% de la population mondiale n’a pas accès à l’eau potable. En France, une personne, chaque jour, gaspille 30 litres d’eau potable rien qu’aux WC.

    Recyclage

    « On est une véritable usine à engrais agricole, s'enthousiasme Christophe Gatineau. Nous en produisons tout un chacun de quoi couvrir un quart des besoins de notre agriculture. Mais que fait-on ? On le jette, on tire la chasse ». Pourquoi, en effet, envoyer nos excréments dans les égouts alors qu’on pourrait les recycler ? « Ce que nous excrétons est le produit digéré de ce que nous avons mangé, poursuit Christophe Gatineau. En dehors des poissons et de quelques crustacés, on mange des plantes ou alors des animaux qui ont mangé des plantes. Dans un système naturel, les éléments nutritifs doivent revenir là où ils ont été prélevés, c'est-à-dire dans le sol ».C’est la fameuse leçon du chimiste français Lavoisier :« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ».

    Il s’agit en fait de revenir à des méthodes ancestrales, utilisées encore par de nombreux paysans dans le monde, qui n’ont pas les moyens d’acheter des engrais chimiques. Les déjections servent à enrichir le sol, l’humus. Sous nos pieds, il y a de la vie, il y a de l’activité. « Il faut du temps pour que les matières fécales se minéralisent, se transforment en éléments nutritifs par l'action naturelle des micro-organismes et toute la faune du sol, en particulier les vers de terre. On n'a rien trouvé de mieux depuis la naissance de l'agriculture », estime Christophe Gatineau, auteur également d'un Eloge du ver de terre.

    Carottes élevées au pipi

    Mais il n’y a pas que le caca, il y a aussi le pipi. Notre urine est pleine d’azote, un autre nutriment dont les plantes ont besoin. Bien sûr, il y a une petite barrière psychologique quand on passe à table. Christophe Gatineau s'amuse des réactions que provoquent ses carottes, qu’il fait pousser, et qu’il sert à ses invités. « Ils aiment le goût, leur trouvent une très belle couleur, une belle texture sous la dent, etc. Et quand je leur dis qu'elles ont été élevées avec les urines de la famille, c'est le choc ! On me dit que ça doit être dégueulasse, que ça doit être rempli de microbes... En revanche, si je leur avais dit qu'elles avaient été élevées aux engrais chimiques et aux pesticides, ce n'aurait pas posé de problème. C'est ça qui est curieux... » Le fumier, produit par les animaux et utilisé pour enrichir les sols, ne pose pas de problème. Nos déjections sont finalement du fumier humain. C'est naturel, c'est gratuit. C'est cacastucieux !

    À lire aussiL'urine humaine utilisée comme engrais: des premiers tests prometteurs

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  • Le printemps va-t-il disparaître?
    2025/04/15
    L'Europe a connu sa plus chaude année en 2024. L'été dure plus longtemps, les autres saisons sont plus courtes, et le printemps arrive plus tôt, ce qui n'est pas sans conséquence sur la végétation et l'agriculture. La question, on le concède, peut paraître provocatrice, mais c'est déjà une certitude : sous l’effet du changement climatique, les saisons intermédiaires, le printemps et l’automne, sont plus courtes, parce que les étés durent plus longtemps et contribuent ainsi à la hausse globale des températures, qui atteint en Europe, en climat tempéré, un nouveau record annuel, selon le rapport publié ce matin par l'institut Copernicus.Le printemps, plus court, arrive aussi plus tôt. « On a mesuré un décalage de l'ordre de 10 à 15 jours depuis les années 60, et dans la mesure où le climat se réchauffe, on pense que cette précocité du printemps va se poursuivre, pour commencer début mars », précise le climatologue Christophe Cassou, directeur de recherche au CNRS.Le printemps arrive plus tôt parce que l'hiver est plus court. Et les neiges fondent plus tôt. « On a une diminution de la couverture de neige, de manière drastique au mois de mars, ce qui fait que les conditions froides, ou le réservoir de froid qui provenait de l’hiver, déjà bien entamé, se réduit, voire n’existe plus », poursuit Christophe Cassou.Gel tardifD’instinct, et parce que nous humains apprécions les températures douces, les beaux jours, on pourrait penser que ces printemps précoces sont une bonne nouvelle. Pour le chiffre d’affaire des cafés sûrement, dont les terrasses se remplissent de plus en plus tôt dans l’année. Mais un printemps précoce a aussi un effet sur la végétation, et c’est une autre histoire.Les plantes sortent plus tôt de leur torpeur hivernale – oui, un peu comme nous humains finalement. Les bourgeons, qui vont donner naissance aux feuilles et aux fleurs, commencent à s’ouvrir de plus en plus tôt (c’est ce qu’on appelle le débourrement). Et c’est un vrai problème quand survient, un peu plus tard, un épisode de gel tardif.Parler de gel printanier quand on évoque le réchauffement climatique peut paraître contre-intuitif. Mais ces gelées tardives arrivent régulièrement, en particulier au mois d’avril.À lire aussiDes printemps toujours plus précoces ? Comment les plantes déterminent leur date de floraisonCatastrophes agricolesLa fleur, ou même le fruit, a commencé à se développer, parce qu’il a fait plus chaud plus tôt, et le bourgeon, comme une enveloppe, n’est plus là pour la protéger. Résultat, en particulier pour l’agriculture, c’est souvent la catastrophe.Vignes et arbres fruitiers sont particulièrement exposés. Adieux pêches, abricots, cerises… Autant de fruits qu’on ne pourra pas manger. En avril 2021, une année particulièrement catastrophique, un épisode de gel tardif avait coûté, rien qu’en France, plus de 4 milliards d’euros.Pour s’en prémunir, les agriculteurs peuvent utiliser des bougies, la nuit, qui chauffent pour éviter le gel. C’est très photogénique, ça fait de belles images à la télé, mais ça coûte cher aux cultivateurs : 500 euros par hectare et par heure. Avec un bilan carbone très discutable.ParasitesLe bouleversement des saisons a une autre conséquence sur les plantes, avec un double phénomène à l’œuvre, qui concerne les parasites, sous l’effet des hivers plus doux.« La disparition des coups de froid successifs diminue la mortalité des parasites, et donc quand le printemps revient, ces parasites sont déjà présents et affaiblissent certains végétaux », explique Christophe Cassou.À plus forte raison quand ces plantes n’ont pas pu profiter d’un hiver entier. Le repos végétatif, induit par le froid, a été trop court. Les plantes s’épuisent, ont moins de force pour résister aux attaques. C’est un peu comme nous, humains : on est moins performant quand on ne dort pas assez.À lire aussiLes températures douces inquiètent les agriculteurs qui craignent un retour du gel au printemps
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  • Pourquoi les climatosceptiques prospèrent-ils dans les médias?
    2025/04/14
    128 cas de désinformation climatique ont été détectés en trois mois sur les télés et les radios françaises, selon une étude réalisée par plusieurs associations. L'une d'entre elles, CNews, propriété de Vincent Bolloré, a même été sanctionnée, une première mondiale. La crise climatique est-elle aussi une crise médiatique ? C’est l’une des questions que pose en creux une étude sur la désinformation climatique en France publiée par trois ONG, QuotaClimat, Data for Good et Science Feedback. L’ensemble des médias audiovisuels français, télés et radios, ont été passés au crible par une intelligence artificielle, et le résultat est accablant : en trois mois, 128 cas de désinformation climatique ont été détectés. Ces cas problématiques se retrouvent très largement sur les médias privés (à 81%).À lire aussiQu'est-ce que l'amnésie environnementale?Le grand champion, c'est Sud Radio, qui en cumule un tiers, en invitant régulièrement des négationnistes du climat, comme un physicien à la retraite, François Gervais, qui nie le rôle du CO2 dans le réchauffement climatique, avec un argument déroutant : « Savez-vous combien on émet de CO2 en respirant, si tant est qu’on a encore le droit de respirer ? Pendant une vie, on émet 25 tonnes de CO2 en expirant. » « Ah oui, c’est intéressant », se contente de lui répondre l’animateur André Bercoff. Non, ce n’est pas intéressant, c’est juste absurde.Fake news« Le changement climatique, sa gravité, relèvent des faits, malheureusement, pas des opinions », rappelle Jean Savignon, chargé d’étude à QuotaClimat. La diffusion de fausses informations sur la crise climatique est un problème démocratique. « Que les angles éditoriaux des médias parlent plus à leur public, c’est une chose. Qu’on désinforme pour parler à un public, c’en est une autre. Et là, ça contrevient massivement au droit à l’information garanti par la Constitution. »À lire aussiLa désinformation climatique attisée par l'arrivée de Donald Trump au pouvoirNon content d’inviter des « dénialistes », comme on appelle aussi les négationnistes du changement climatique, certaines chaînes abritent des animateurs ouvertement climatosceptiques, à l’image de CNews et de sa « star » Pascal Praud. « Il est là, le réchauffement climatique : moins 3 degrés ce matin dans les Yvelines. Aucune valeur négative n’avait été observée en plus de 75 ans », lançait-il un matin d’hiver avec un ton qui se voulait ironique, mais confondant météo et climat. Une première mondiale pour CNewsEn matière de désinformation climatique, CNews et Sud Radio se distinguent. Sud Radio est régulièrement accusée de diffuser des propos complotistes, sur le Covid ou le climat. Quant à CNews, la chaîne de télé appartient à Vincent Bolloré à l'agenda politique assumé : favoriser l'arrivée de l'extrême droite au pouvoir. Ce n’est pas un hasard si ces deux médias sont les deux plus mauvais élèves en matière d’information climatique. « Tous les deux ont été condamnés l’an dernier, rappelle Jean Savignon, de QuotaClimat. Sud Radio a deux mises en garde, et CNews a reçu une sanction financière pour désinformation climatique, ce qui était une première mondiale ! Il y a une stratégie de l’extrême droite qui a été théorisée : plutôt que de s’attaquer au changement climatique, on s’attaque à l’entièreté de ces messagers. » En témoigne par exemple une séquence diffusée en direct sur CNews en 2019, dans laquelle Pascal Praud avait invité la militante écologiste Claire Nouvian. « Je voudrais que vous vous calmiez, ce qui nous ferait plaisir », s’énerve l’animateur à l’adresse de Claire Nouvian. « Mais vous trouvez ça normal ? », répond l’intéressée avant d’être interrompue par la journaliste Elisabeth Lévy, chroniqueuse régulière de l’émission de Pascal Praud : « C’est vous qui êtes folle, là ! C’est vous qui êtes dingue ! », hurle-t-elle. L’insulte, argument ultime. RFI numéro 1Face à la crise climatique, y a la désinformation, et puis il y a le manque d'information. Alors que l'environnement est le deuxième sujet qui intéresse les Français dans les médias, après la santé, selon une étude publiée l’an dernier par l’Arcom, le régulateur des médias audiovisuels français, seulement 3,7% des programmes d’information était consacré en 2024 à la crise climatique, et même 2% pour les trois derniers mois étudiés. « C’est grave, réagit Jean Savignon. Parce que moins on est informé, plus on perméable, par la force des choses, à la désinformation. »Votre radio, RFI, se situe, elle, très largement au-dessus de la moyenne. Les sujets sur l'environnement occupent 6% des journaux et des tranches d'information. Numéro 1, tout simplement, et très loin devant.
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