-
Japon: pourquoi le 8e émetteur mondial de gaz à effet de serre traîne à se décarboner?
- 2025/03/05
- 再生時間: 3 分
- ポッドキャスト
-
サマリー
あらすじ・解説
Des feux de forêts comme en ce moment dans le nord du pays, des étés de plus en plus chauds, des inondations. À l’image du reste du monde, le Japon vit les effets du réchauffement mondial. Face à ce défi, le gouvernement de Shigeru Ishiba vient de fournir à l’ONU son nouveau plan climat avec un objectif revu à la hausse : d'ici 2035, réduire de 60 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport à 2013. Mais cela ne semble pas suffisant. Comme toute économie développée, le Japon a une responsabilité historique dans le réchauffement climatique et celle-ci perdure. L'archipel est aujourd'hui 8ᵉ émetteur mondial. « Il a longtemps été le 5ᵉ pays à émettre le plus de gaz à effet de serre [responsables du changement climatique], souligne Hanna Hakko, spécialiste de la décarbonation du secteur énergétique au Japon au sein du groupe de réflexion européen E3G. Mais ces dernières années, des pays émergents comme l’Indonésie et le Brésil se sont mis à émettre encore plus ».Le Japon est très dépendant des énergies fossiles qu’ils importent massivement (d’Australie et de pays asiatiques notamment) pour produire de l’électricité, pour l'industrie et pour les transports. Et la catastrophe nucléaire de Fukushima de 2011 a eu un triple effet.L'accident nucléaire — le pire au niveau mondial depuis Tchernobyl — qui a suivi le séisme et le tsunami « a ouvert les yeux aux Japonais sur l'importance d'économiser l'énergie et sur les dangers du nucléaire », explique Masayoshi Iyoda, porte-parole au Japon de l'ONG environnementale 350.org. « Après Fukushima, les gens ont cherché à maximiser l'efficacité énergétique des bâtiments, des écoles, partout au Japon. Et de nombreux groupes de la société civile ont lancé des projets communautaires d'énergies renouvelables dans leurs villes ».Après le choc de Fukushima et ses 18 000 morts, le gouvernement a aussi fermé temporairement ses réacteurs et pour compenser, il s'est mis à construire des centrales à charbon et à gaz. Résultat : « un pic d'émissions carbone en 2013 et depuis le pays lutte pour faire redescendre ses émissions », explique Hanna Hakko.Les entreprises d’énergies fossiles ont freiné la décarbonationMalgré tout, les énergies renouvelables se développent. « Aujourd’hui, les lieux publics regorgent de publicités de l’État et d’entreprises qui vantent leur décarbonation via les énergies renouvelables et le nucléaire et il est commun de voir des panneaux solaires sur les toits », décrit l’experte qui revient de sept années passées dans le pays. Entre 2013 et 2022, les émissions ont baissé de 19 %, selon le dernier rapport officiel japonais.Mais cela ne va pas assez vite. Et selon les scientifiques, le nouvel objectif de moins 60 % d'ici à dix ans ne permet pas d'être dans les clous de l’Accord de Paris qui vise à contenir le réchauffement global à +1,5° par rapport à l’ère industrielle.« D’après le Climate Action Tracker, un groupe indépendant de scientifiques du climat, la cible du Japon devrait être d’atteindre au moins 81 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2035 », presse Masayoshi Iyoda, de l’ONG 350.org.Qu’est-ce qui coince ? Pour développer les énergies décarbonées, le Japon a fait face à un « problème d’accès aux terres limité », mais il a aussi manqué de volonté politique, estime Hanna Hakko, du groupe de réflexion E3G. « Certaines grandes entreprises japonaises ont pendant longtemps plaidé pour continuer à utiliser les énergies fossiles. Elles ont priorisé des bénéfices à court terme, liés à ce modèle-là. Cette façon de penser a eu une influence significative sur les politiques publiques et cela a ralenti la décarbonation et les objectifs et réglementations du gouvernement », analyse-t-elle. Elle se réjouit qu'aujourd'hui d'autres entreprises fassent rimer décarbonation et croissance économique.Selon les plans climat et énergie présentés par Tokyo en février, le Japon veut développer les panneaux solaires et les éoliennes en mer et innover en la matière. « Ils travaillent notamment sur des panneaux solaires plus légers et sur des éoliennes flottantes », détaille Hanna Hakko. Objectif du pays : faire des renouvelables sa première source d'énergie d'ici 2040.Le gouvernement nippon entend aussi rouvrir davantage de centrales nucléaires, mais il se heurte aux craintes d'une partie de la population.Alors que l’Accord de Paris fêtera ses dix ans à la fin de l’année, le militant écologiste Masayoshi Iyoda insiste : pour tous les projets énergétiques, « les voix locales doivent être entendues ». Pour lui, il ne s’agit pas seulement d’un enjeu climatique, mais aussi de démocratie.