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サマリー
あらすじ・解説
À moins de transformer rapidement le Sénégal en un paradis terrestre, les leaders actuels de ce pays pourraient, passé la lune de miel, voir surgir une génération spontanée d’opposants virulents au Pastef, propres à leur donner des insomnies, comme eux, naguère, en donnaient à Macky Sall. Avec l’écrasante victoire du Pastef aux législatives, le duo Bassirou Diomaye Faye - Ousmane Sonko va pouvoir déployer son programme au service du peuple sénégalais. Que laisse donc présager, pour la démocratie sénégalaise, cette victoire à laquelle beaucoup s’attendaient certes, mais pas avec une telle ampleur ?Ce triomphe marque, en tout cas, une très grande confiance des Sénégalais en ce duo aux commandes de leur pays. La victoire, dès le premier tour, de Bassirou Diomaye Faye à la présidentielle de mars dernier, avec plus de 54 % des voix, pouvait être perçue comme la volonté d’en finir avec le président sortant et le successeur qu’il s’était choisi. Avec l’écrasante majorité du Pastef aux législatives, le doute n’est plus permis : le peuple sénégalais désire ardemment confier son destin à cette équipe nouvelle. Contrairement à ce que l’on observe dans de plus en plus de démocraties, les électeurs ne se sont pas, ici, servi de leur bulletin de vote comme d’un lance-pierre pour régler des comptes ou se venger. Ils ont choisi un président, en mars, et plébiscité, en novembre, un Premier ministre. L’on ne peut donc se méprendre sur leur volonté de confier leur destin à ces deux hommes, qui vont devoir mériter cette confiance, par des résultats palpables.À lire aussiLégislatives au Sénégal: le parti au pouvoir Pastef revendique une «large victoire»C’est maintenant que commence véritablement l’alternance. Sauf que les électeurs de base du Pastef, qui ont, ces dernières années, mené la vie dure à Macky Sall, semblent avoir des besoins d’une relative urgence. Ils ne vont peut-être pas pouvoir patienter longtemps, sous prétexte que le passif hérité du président Macky Sall serait lourd. Cette belle victoire oblige donc le duo aux commandes du Sénégal à des résultats concrets, rapidement.Faut-il comprendre qu’ils risquent l’impopularité, tous les deux ?Elle les guette, en tout cas. Car, une si écrasante majorité à l’Assemblée nationale peut s’avérer une source d’angoisse, face à des populations qui n’en peuvent plus de patienter et pourraient, assez vite, s’agacer des allusions aux difficultés héritées du prédécesseur, trop souvent servies, pas seulement au Sénégal, comme justification à la lenteur des solutions à leurs propres difficultés.N'oublions pas que le Pastef a lui-même prospéré, ces dernières années, sur les insuffisances réelles ou supposées du pouvoir de Macky Sall, face aux revendications et autres frustrations des Sénégalais lassés d’attendre. C’est ainsi que cette formation, arrivée en dernier sur l’échiquier politique, a peu à peu éclipsé ou réduit à leur plus simple expression les prétendants habituels. Il ne peut donc, décemment, appeler aujourd’hui les Sénégalais à se montrer raisonnables, ou à modérer leurs exigences pressantes.Évidemment, le duo Faye-Sonko aura un délai de répit. Mais, s’il tardait à agir massivement sur le quotidien du plus grand nombre, des nouvelles oppositions, encore plus impatientes, et des protestataires, encore plus virulents, pourraient émerger pour les gêner.À lire aussiSénégal: les chantiers prioritaires du parti Pastef, avec sa large majorité, attendus au ParlementCe n’est tout de même pas une fatalité...Non. Mais c’est une constante du jeu démocratique au Sénégal. Chaque pouvoir trouve ou génère, dans son opposition, une frange qui les embarrasse en jouant sur les frustrations. Abdoulaye Wade l’a été pour Abdou Diouf quand celui-ci n’était pas rallié, au gouvernement. Abdoulaye Wade a eu les siens, plutôt des dissidents issus du PDS, son propre parti, tel Idrissa Seck ou Macky Sall, qui lui ont, certes, donné moins d’insomnies que lui n’en a donné à Abdou Diouf. Mais Macky Sall a fini par battre maître Wade. Ousmane Sonko aura été, pour Macky Sall, ce que Wade fut pour Diouf. À moins que le Sénégal ne devienne en quelques années le paradis terrestre dont rêvent certains, il n’est pas exclu, passée la lune de miel, que surgisse une génération spontanée d’opposants virulents au Pastef. Ousmane Sonko pourrait, alors, méditer sur les insomnies qu’il donnait naguère à Macky Sall…